Sujet: Apprendre du passé. [Flashback / Entrainement] Mar 25 Sep - 18:27
Heavy Thoughts
Un oiseau vint lentement se poser non loin de moi, vrillant son regard dans les alentours puis dans mes yeux, sa petite tête tressautant sans cesse pour chercher un autre angle de vision alors qu’il s’avançait sur la branche légère et timide, sautillant avec une allégresse pour laquelle on donnerait tout sans confession. Je l’observais sans rien dire, adossé au tronc de l’immense chêne, une jambe étendue le long d’une ramification plus massive et l’autre pendant paresseusement dans le vide. Le soleil balayait le terrain d’entrainement et les alentours, même si ses rayons étaient totalement inefficaces contre le voile opaque des feuilles au-dessus de ma tête. Profitant de ce coin d’ombre, perdu comme d’habitude dans mes pensées plus ou moins intéressantes et profondes, je m’étais permis une petite pause contre la structure solide de cet arbre centenaire. Immobile, je restais fixé sur la petite créature ailée qui se déplaçait sur les branches tout en me jetant parfois ces coups d’œil curieux, propres aux animaux. Son petit bec laissait parfois s’échapper quelques gazouillis joyeux et innocent, que je suivais d’un air absent, profitant de cette douce mélodie se mêlant à celle du vent qui s’infiltrait dans la cime de mon support, laissant un souffle presque imperceptible parvenir jusqu’à mes oreilles. Je soupirais tout en regardant la bête timorée, me demandant ce que ça pouvait bien faire, de n’avoir pas conscience de toute cette misère qui animait le monde humain. Juste s’envoler en laissant tout le reste en bas. Laisser les problèmes, laisser les sentiments et aller droit vers le soleil. La guerre me donnait des réflexions que je ne me connaissais pas… du moins, pas de cet ordre-là. J’avais toujours été quelqu’un qui réfléchissait beaucoup, m’enfermant dans mes pensées au lieu de m’ouvrir aux autres par le dialogue, et ce depuis tout petit. Je pensais beaucoup mais je ne disais rien, sans avoir forcément d’évènement majeur à gérer. Alors avec cette guerre qui faisait rage, me retrouver un moment avec moi-même m’entrainait facilement dans les plus intenses réflexions, laissant mon corps à l’abandon contre la matière. Je regardais l’oiseau, pris d’une soudaine envie de me confier.
- Ta vie est bien paisible, n’est-ce pas ?
Comme je m’y attendais, aucune autre réponse que quelques bruits inarticulés et des sautillements contre les branches, tandis que l’émetteur de ces sons m’ignorait totalement. Ce n’était pas tellement sa conversation que je recherchais, il fallait bien l’avouer. Peut-être juste que cette petite chose plumeuse se révélait un bon support pour que j’exprime ma pensée à voix haute. Je voyais mal qui aurait pu venir me déranger sur mon perchoir et au fond, je m’en fichais pas mal. Un petit moment de paix intérieure, je comptais bien en profiter.
- Tu es chanceux, dans un certain sens.
Je soupirais de nouveau. Beaucoup auraient pu dire que je racontais des sornettes. Les animaux subissaient sans cesse les actions des hommes, sans pouvoir y changer quoi que ce soit. Les champs de batailles comme les villages poussaient indifféremment de leurs avis, les obligeant à fuir pour trouver refuge ailleurs. Les forçant à trouver un nouveau foyer et une nouvelle vie. L’homme était parfois un monstre malgré lui, lorsqu’il ne l’était pas consciemment. Tyran de lui-même et de la nature, poussant ses vices au summum pour entrainer tout ce qui l’entourait dans une sarabande gangrenée. C’était ce qui se passait continuellement dans le monde shinobi : des hommes et des femmes s’élevaient de leurs conditions pour revendiquer la force de leurs ambitions, entrainant avec eux des partisans poussés par divers motifs, de l’idéalisme absolu au simple appât du gain. Des personnages de guerre comme de diplomatie, qui par la parole ou les armes asseyaient leur domination sur leurs voisins. Cette guerre n’était qu’un parfait exemple de ce schéma ô combien désespérant, mais également inéluctable. Le leader de l’Akatsuki, Kabuto… autant de personnages qui voulaient être reconnus pour ce qu’ils montraient d’eux. Ils nourrissaient des projets de grande envergure que nous combattions car ils semblaient totalement déraisonnables. La machine avait été maintenue en état de marche : celle de la violence humaine. Des gens étaient déjà morts durant ce conflit, des gens qui ne seraient pas oubliés par ceux qu’ils avaient et par qui ils avaient été chéris. Des gens destinés à être vengés, cet acte de vengeance même perpétuant le cycle sans fin. Vivre libre dans un monde destiné à haïr ou vivre en paix dans un monde illusoire ? C’était une excellente question à laquelle je ne prétendais pas avoir la réponse. Ces deux philosophies étaient celles qui s’affrontaient durant cette guerre, leurs défenseurs s’entretuant sans doute ni remords. Du moins, pour la plupart. Toute cette situation était lassante mais inévitable. J’avais pris le parti, en m’engageant dans l’art shinobi, d’accepter la laideur qui pouvait résider dans ce monde et de prendre sur moi. Je n’étais pas l’un de ces grands révolutionnaires et je ne comptais pas devenir une idole dédiée au changement. J’étais Junin de Kumo. Mon village était en guerre… j’aiderai mon village. Officiellement, les choses devaient s’arrêter là. Je gardais mes pensées pour moi et appliquais les ordres.
- Je serai fort tenté de m’envoler moi aussi, si j’en avais les moyens. Beaucoup de personnes le feraient sans hésiter.
Fuir. Fuir les décombres et laisser les ruines restantes s’écrouler, être submergées par la folie des combats. Etait-ce réellement la solution ? Je ne le pensais pas personnellement, mais je devais reconnaitre qu’elle semblait promettre monts et merveilles. N’importe quelle personne fatiguée par toute cette mascarade sanglante trouverait un certain intérêt à pouvoir y échapper. Moi-même je trouvais parfois l’idée alléchante : mais cela ne signifiait pas qu’elle était bonne pour autant. Les idées les plus difficiles à appliquer sont parfois les meilleures. Rester était la meilleure solution. Rester et combattre. J’avais des choses à protéger durant cette guerre, ce n’était pas à prendre à la légère. Des choses qui me tenaient à cœur et donnaient un sens à ce que j’étais. Chacun avait ses motivations. Certains voulaient le pouvoir, le contrôle. D’autres se mettre à l’épreuve pour eux même. Je voulais me mettre à l’épreuve pour moi-même mais aussi pour ceux autour de moi. Plus je m’améliorais et plus j’étais certain de pouvoir prendre soin de ce que je devais garder précieusement. L’oiseau s’envola vers une autre destination, me laissant seul contre ma branche. Je tournais lentement la tête vers le terrain d’entrainement. Combien d’heures avais-je passées ici ? Trop pour pouvoir en donner un chiffre exact sur l’instant. C’était en quelque sorte une deuxième maison durant toute mon adolescence, à partir de l’instant ou je m’étais mis à pratiquer la discipline exigeante du Nin-Taijutsu. Des heures passées à suer sous le soleil comme sous la pluie, indifférent au climat, frappant dans le vide, répétant les mêmes mouvements, adoptant les mêmes postures, exécutant diverses exercices physiques tels que des pompes et des abdominaux, des tractions. Ces efforts n’avaient pas été vains, bien au contraire, ils m’avaient transformé. J’étais parti de ce petit garçon discret et silencieux, à l’apparence physique fragile et aux capacités inexistantes. J’avais démarré ma progression de ce point auquel devenir ninja semblait être une idée destinée à l’échec, tant mon propre caractère et mes aptitudes contredisaient ce fait. Mais tout ceci n’avait été rien d’autre qu’un départ, l’état larvaire du papillon et toutes ces années de pratiques avaient été le cocon, la chrysalide, l’entre deux. Avec le temps, mes muscles s’étaient développés, ma volonté et mon mental s’étaient renforcés, ma tolérance à la douleur et mon gout de l’effort prenant une nouvelle ampleur les mois passants. J’avais trouvé ma voie, aussi inattendue fut-elle, dans ce même terrain d’entrainement qui m’avait sans doute vu grandir et dans lequel je dépensais encore pas mal de mon temps, en comparaison de la plupart de mes collègues. Les pierres de ce terrain rocailleux, je les avais foulées encore et encore jusqu’à ce que mes jambes soient aussi lestes que celles d’un léopard. Aujourd’hui, je les empruntais la plupart du temps en marchant au lieu de courir comme autrefois. Les rochers me servaient d’appuis plus que de cibles. Je prenais ma place dans ce grand arbre, tout comme mon sensei le faisait autrefois lorsqu’il m’observait me démener pour atteindre les objectifs que je m’étais fixer. Tout ça pour quoi ? Tout ça pour devenir celui que j’étais à ce jour : un spécialiste du combat rapproché. Tout ça pour pouvoir protéger ma sœur comme je me devais de savoir le faire, quelque en fut le prix. Tout ça pour devenir la fierté de mon père…
Raimei Hokoru Juunin de Kumo
Messages : 330 Date d'inscription : 20/06/2012 Age : 29 Localisation : Demandez à Misaki.
Sujet: Re: Apprendre du passé. [Flashback / Entrainement] Mer 26 Sep - 21:27
Remembrance
(À relancer)
« Encore…. Encore une petite… pompe… j’allais y arriver, je devais y arriver ! Mon père était en train de me regarder de cet air que je lui connaissais si bien, cet air qu’il n’adoptait qu’à l’entrainement lorsque je me trouvais avec lui. Ses yeux perçants étaient plissés dans une expression sévère et la neutralité de son rictus laissait suggérer qu’il était totalement concentré sur le moindre de mes mouvements, m’analysant en silence alors que je m’efforçais à finir ma série dans un effort qui me semblait toujours plus difficile sur la fin. Tremblant, les bras tétanisés et le corps tout entier gainé dans l’optique de finir ce que j’avais entrepris, je suais à grosses gouttes et mon visage était rougis par l’afflux sanguin provoqué par toutes ces péripéties physiques. Je poussais de toutes mes forces sur mes paumes, redressant mon tronc avec difficulté, tressaillant de toute part. La dernière ! Une fois redressé, je poussais un long soupir avant de me relever en laissant s’échapper un bruit contrit, passant mon avant –bras droit sur mon front dans un geste large, essuyant la transpiration qui s’y était répandue. La figure paternelle continuait de m’observer en silence. Habillé simplement de son uniforme de Junin, le bandeau frontal ceint sur le biceps droit et le plastron de cuir absent, il se tenait droit avec les bras croisés sur la poitrine, stoïque. Ses yeux bruns me fixaient avec une attention silencieuse alors que je m’approchais de lui, encore haletant, le cœur battant la chamade dans ma poitrine. Mes muscles me faisaient un peu souffrir mais ça passerait, comme d’habitude. Que ce fut avec Sangaku-sensei ou avec mon père, les séances d’entrainement étaient intensives. J’étais un adepte de l’effort du corps et on me poussait activement dans cette voie. Du haut de mes dix-sept ans, je possédais déjà un niveau très prometteur en Taijutsu et mes compétences en Ninjutsu s’amélioraient, elles aussi. La discipline qui était la mienne était la même que celle du Raikage… ce qui quelque part, me plaisait intérieurement. L’idée de suivre les traces d’un personnage de si grande envergure était plaisante, il en aurait été de même pour n’importe quel jeune ninja suivant les traces de son leader, tant qu’il le respectait un tant soit peu. La comparaison mon valorisait toujours et mon père l’utilisait souvent pour me faire tenir bon quand, au cœur de l’entrainement, je commençais à sentir le désespoir me guetter alors que mes forces faiblissaient. Cela me poussait également à améliorer mon mental, qui se révélait primant sur mon physique.
- Tu t’améliores, Raimei. Mais ne te relâche pas… il te reste encore des choses à apprendre.
- O-oui. Qu’est-ce qu’on fait, maintenant ?
J’avais répondu avec une pointe d’hésitation au départ, ce qui était dû en grande partie au fait que mon père était l’une des rares personnes qui étaient capable de me faire perdre mon détachement naturel et personnel. En sa présence, je me sentais constamment comme mis à l’épreuve, pas dans un mauvais sens, mais bien parce que j’avais toujours cette crainte pernicieuse de le décevoir. Je redoutais cela, je le redoutais tant que lorsqu’il était dans mon champ de vision, je calculais mes moindres faits et gestes, je réfléchissais d’autant plus avant de parler. Je fuyais ma personnalité qui semblait assez laxiste sur les bords afin d’adopter des codes : les codes que je m’étais dictés afin d’être, pour le plus longtemps possible, une fierté pour lui. Alors qu’il m’observait comme si quelque chose le tracassait, je restais là, soufflant encore de mon effort précédent mais dans une posture qui suggérait que j’étais à l’écoute et surtout, sur le qui-vive. S’il y avait une chose que j’avais apprise, plus ou moins douloureusement avec mon propre sensei, c’était qu’un grand effort n’excusait pas tout dans le cadre de mes entrainements. Même si j’étais encore en train de récupérer de mes pompes, je devais m’attendre à tout moment à ce qu’il m’envoie faire quelque chose d’autre. Il plaça une main sous son menton et le caressa doucement tout en laissant s’échapper un « Mmmm » songeur, très prometteur quant à la suite des évènements. Alors que je me demandais ce qui pourrait me tomber dessus, il s’exprima.
- Il y a quelque chose que je voudrais t’apprendre.
Avant que je ne puisse me demander ce qu’il voulait dire, il forma des signes de main avec une grande vitesse tout en me fixant, pour finalement plaquer ses mains l’une contre l’autre avant d’écarter les bras de chaque côté. Un arc électrique très dense s’en dégagea et sembla suivre le chemin de ses mains, prenant peu à peu une forme rectiligne. Un véritable bâton d’énergie électrique pure venait de prendre forme dans ses mains et, d’un léger mouvement, il provoqua un changement de l’une des extrémités pour en faire une pointe… une tête de lance, car le reste avait tout d’une hampe.
- Tu es doué avec le Raiton, il n’y a pas de doutes là-dessus. Cependant, tu ne dois pas perdre de vue que la polyvalence n’est jamais un défaut dans le monde shinobi... si tu excelles dans le corps à corps, tu dois savoir te défendre à distance aussi.
Sur ces mots, il empoigna son arme et frappa dans le rocher derrière lui, pulvérisant la matière d’un geste large mais mesuré, sans que son visage ne change d’expression. Je restais assez impressionné. Mon père n’était pas du genre très démonstratif, d’habitude, attendant que j’aie compris tout ce que la théorie voulait avant de m’enseigner quoi que ce soit dans la pratique. Or, il ne m’avait jamais parlé de cette technique avant. Ce qui créait donc un vide dans ce schéma pourtant emblématique de lui-même. Il se tourna ensuite sur le côté et balança sa lance de foudre qui alla se ficher dans un arbre avant d’exploser dans une gerbe de chakra élémentaire, se dissipant dans la nature. L’écorce fut fortement malmenée par l’assaut, la lance la transperçant entièrement avant d’endommager l’extérieur de l’arbre. L’arbre où Sangaku-sensei se postait si souvent.
- Tu es trop impulsif avec ton chakra. Tu le laisses circuler librement pour frapper avec, sans tenter de le dompter. Tu dois apprendre à donner forme à ton énergie tout comme je viens de le faire avec cette lance. Concentre toi, répète mes signes de mains et visualise ce que tu vas créer tout en contrôlant tes propres flux d’énergie.
Je restais un peu pantois et acquiesçait silencieusement d’un hochement de tête d’abord timide, puis plus volontaire. Je me plaçais en face de lui alors qu’il m’observait sérieusement, joignant ses doigts pour commencer à m’apprendre les signes nécessaires à l’utilisation de ce jutsu. Chien, bœuf, cochon, dragon… je répertoriais visuellement alors qu’il changeait de position en vitesse ralentie afin de me laisser le temps de suivre son rythme. Après quelques séances de copiage pures et simples, je me sentis prêt à effectuer le passage à la pratique. Visualiser et contrôler : deux verbes essentiels dans l’apprentissage de ce jutsu. Alors que je formais les mudras en malaxant mon propre chakra, mon père le faisant en même temps que moi, je me concentrais intensément. Puis je plaquais mes paumes l’une contre l’autre avant de sentir la friction, l’étincelle jaillir, retirant doucement mes mains pour observer l’arc électrique que je peinais déjà à maintenir stable. J’écartais doucement les bras, me poussant à donner une forme à cette dose de chakra qui s’étendait entre le bout de mes doigts. C’était d’une difficulté nouvelle pour moi. Je n’avais jamais vraiment essayé de contrôler en profondeur mon énergie, l’utilisant de façon plus explosive, la laissant me parcourir. Mais cette fois, je devais me concentrer et la canaliser. C’était quelque chose que je n’étais pas habitué à faire et cela se fit ressentir lorsque la gerbe électrique implosa à mi-chemin de sa formation, mon père continuant comme si de rien n’était. Je tombais presque en arrière, ne me rattrapant que par un astucieux mélange d’adresse et de chance. Il termina la sienne et me fixa dans les yeux.
- Recommence.
Je déglutis. L’idée de ne pas être à la hauteur venait de me saisir les tripes, mais elle me donna aussi des ailes. J’étais déterminé à y arriver car la peur d’échouer m’était très désagréable. Je recommençais donc dans l’espoir d’apprendre rapidement ce Jutsu… ce qui fut loin d’être le cas. La première autre tentative fut elle aussi un échec, suivi d’une deuxième, puis d’une troisième… à chaque fois, je me laissais submerger par mon propre chakra qui explosait dans mes mains, m’envoyant parfois choir, le derrière contre le sol. Je me relevais toujours pour recommencer sous les yeux inquisiteurs de la figure paternelle, qui semblait bien décidée à m’inculquer cette technique avant la fin de cette séance d’entrainement. Cela dit, ça n’allait pas se passer ainsi. Alors que le temps passait et que la position du soleil dans le ciel se dégradait peu à peu, un oiseau messager vint voleter autour du terrain d’entrainement, effectuant des ronds dans le ciel en descendant graduellement. Mon père leva la tête et j’en fis de même alors qu’il effectuait déjà un mouvement du bras pour laisser le rapace atterrir en toute tranquillité sur son bras. Il portait une missive dont mon père se saisi doucement, l’air toujours aussi neutre. L’oiseau s’envola de nouveau vers une autre destination alors que je m’étais arrêté dans ma pratique, observant mon modèle. Il déroula le parchemin et plissa les yeux avant de le ranger dans sa poche sans rien dire de plus. Avant que j’aie pu poser la moindre question, il prit la route de la sortie du terrain tout en m’expliquant de quoi il en retournait.
- Un ordre de mission. Je ne sais pas quand je rentrerai, mais d’ici là, je veux que tu ais réussi à maitriser ce jutsu.
- D’accord.
Il s’avança encore de quelques pas et se retourna vers moi avant de m’interpeller. Je le regardais, intrigué, me demandant ce qu’il pouvait bien me demander. Lorsqu’il devait partir en mission, il ne trainait pas, la plupart du temps. D’ailleurs, je ne le voyais pas partir pour la simple raison qu’il ne prévenait pas toujours de ses absences, souvent parti dans les trente minutes qui suivaient le message lorsqu’il obtenait une réquisition et qu’il se trouvait directement dans le village. Je l’observais sans rien dire, bouche légèrement entrouverte, les yeux curieux alors qu’il m’adressa un sourire, chose qui était assez rare venant de lui.
- Je compte sur toi et j’ai confiance en toi.
Raimei Hokoru Juunin de Kumo
Messages : 330 Date d'inscription : 20/06/2012 Age : 29 Localisation : Demandez à Misaki.
Sujet: Re: Apprendre du passé. [Flashback / Entrainement] Lun 1 Oct - 20:00
Learn from the past
Au final, il n’était jamais revenu de sa mission. Ce fut sa dernière sortie du village en vie, les derniers mots qu’il m’adressa et l’ultime occasion pour moi d’observer ses traits. Mais ça, personne n’en avait conscience. Même si l’on vivait dans un monde en guerre et qu’il n’était pas rare d’entendre des adages comme « on part tous un jour » « les combats n’épargnent personne », même si la vie empruntée par tous les ninjas se construisait au jour le jour et qu’avoir des projets c’était aussi être prêt à les voir s’écrouler, il était impossible d’être toujours dans cet esprit. De toujours ne voir que le pire et s’y préparer constamment… c’était contraire même à avoir une vie saine, avec un minimum de bonheur. Alors quel était l’intérêt ? C’était aussi désacraliser les liens. L’impact et le poids d’une personne que l’on aime, c’est qu’elle a l’air d’être éternelle et immuable, on ne l’imagine pas s’effacer d’un jour à l’autre et nous laisser encore plus seul sur terre. Alors, imaginer constamment que nous n’étions que de fragiles enveloppes charnelles soumises aux caprices du destin… c’était comme renoncer à tout cet aspect dans les liens. C’était ce que je pensais. Mon père avait toujours eu cette dimension de muraille dans mon esprit, l’homme que je devais surpasser en grandissant, mon modèle. Mon héros. Il était d’une constitution solide dans ma mémoire et dans mes croyances, rivalisant avec les diamants les plus purs. Le voir mourir n’était tout simplement pas une option, à ce moment-là. J’avais cru bêtement ce qu’il m’avait dit, j’avais continué de m’entrainer à cette technique sans le moindre succès. Pour finalement apprendre qu’il avait été tué, sans avoir achevé l’apprentissage de ce Jutsu. Son corps avait été rapatrié peu après. J’avais perdu mon père et j’avais été incapable de faire ce qu’il m’avait demandé. C’était pathétique, quelque part. Après sa mort, j’avais abandonné cet entrainement qui me faisait trop mal. J’en fuyais la douleur inhérente, craignant qu’à jamais, reformer cette lance d’éclair entre mes mains ferait ressurgir son visage du passé pour me sermonner. C’était une crainte futile, mais elle faisait écho à la douleur que j’éprouvais de son absence. Surtout… que dirait-il, maintenant ?
Observant le terrain d’entrainement, je serrais les dents et fronçais légèrement les sourcils tout en me redressant partiellement, appuyant mon poing contre le tronc de l’arbre. J’avais fait ce qu’il m’avait demandé… sauf pour une chose. Apprendre cette technique, celle-là même que j’avais abandonnée suite à son décès, encore trop fragile moralement pour me replonger vivement dans son souvenir. Mais au final, ça faisait trois ans déjà que je n’avais plus retouché à la lance de foudre. L’idée me sembla à la fois sombrement sarcastique et pitoyable tout à la fois. Qu’avais-je fait de mon nindo, durant ces trois années ? Ma voie du ninja, celle me disant que tant que je n’étais pas mort, je pouvais faire mieux. Qu’un échec était d’une utilité finale, celle de ne plus le reproduire. L’échec, bien encaissé, était à coup unique. Je m’étais toujours mis en tête de garder cette façon de voir les choses car c’est ce que lui m’avait appris. Sans cette ligne de conduite, je n’étais guère plus grand-chose… pourtant, je n’avais toujours pas appris cette capacité. Sa mort avait été trop difficile à surmonter, ce n’était pas quelque chose qui touchait mon ego, ma fierté, ou ma responsabilité même. C’était juste un mauvais coup du destin. Pour cette même raison, il m’était impossible de faire un travail sur moi-même pour me débarrasser de cette douleur. Je devais attendre que le temps fasse son œuvre… je m’en étais remis à mes fonctions pour passer le cap, j’avais tout donné à ma vie de shinobi parce que ça me paraissait être une bonne façon non seulement de soigner la plaie encore douloureuse, mais aussi de rendre hommage à tout ce qu’avais pu être mon père. Mais je devais continuer sur ma lancée, ma peine n’était pas encore évacuée. Il me fallait affronter la passé.
Je descendis de mon arbre en poussant un soupir, atterrissant avec souplesse en contrebas. Plaçant la paume de ma main contre l’écorce, je me redressais et sentis un relief contre mon support, mes doigts s’enfonçant de quelques centimètres. Je tournais la tête par réflexe. Oui, bien sûr… je m’en souvenais parfaitement. La lance de foudre de mon père s’était fichée en plein dans cet arbre qui en était encore marqué. Son épiderme naturel avait été fortement malmené par l’acte et une différence de texture était clairement visible, telle une cicatrice béante. Depuis, l’arbre avait repris du poil de la bête, mais je me souvenais avec clarté de la forme électrique formée par mon père qui s’y fichait avec une facilité déconcertante pour ensuite se dissiper, emportant écorce et sève avec elle de façon indifférente. Devant cette marque, je me sentais un peu stupide. N’avoir jamais apprise cette technique… j’aurai du. Mais n’en avais-je pas encore le temps ? Après tout, j’étais en repos pour le moment mais je n’avais aucune idée de comment passer le temps. Puis… j’y trouvais une certaine importance. J’avais grandi et mûri depuis la dernière fois que je m’étais adonné à l’exercice. Je n’avais que trop fait durer l’apprentissage, il était temps que j’en finisse avec tout ça. Mon père avait toujours eu raison de m’apprendre ce qu’il m’avait appris, j’allais donc suivre son ultime demande. Quelque part, je me sentais déjà mal de prendre conscience de tout le temps qu’avait duré cette fuite à mon engagement. Je me reculais de quelques pas tout en observant l’endroit vide, me replaçant à l’exacte position à laquelle je me trouvais trois ans plus tôt. Cela me ramenait des souvenirs, pour sûr. Je me souvenais encore des signes de main, que je formais de nouveau, d’abord avec une certaine lenteur puis de plus en plus vite, jusqu’à les avoir totalement maitrisés à nouveau et être capable de les exécuter à grande vitesse. J’avais encore un bon moment pour tenter de maitriser la technique, avant que ma sœur ne s’en fasse pour rien. Mon contrôle de mon propre chakra s’était largement affiné depuis, j’avais gagné en expérience et appris à m’économiser, ce qui m’avait obligé à approfondir mes capacités de Ninjutsu. Selon mes souvenirs, cette technique n’était pas d’un grand répertoire. Avec de la persévérance, il ne me faudrait que quelques heures. Je malaxais donc mon chakra…
Pour me lancer. Effectuant les mêmes gestes que par le passé, j’y apportais néanmoins l’expérience acquise depuis, la maturité dont je manquais alors au niveau technique. Plus sûr de moi, je plaquais mes mains les unes contre les autres avant de les retirer lentement, de chaque côté, formant cet arc aux couleurs vives qui crépitait entre mes paumes. Cela me prendrait peut-être mon après-midi, mais je m’en fichais bien. Le soleil avait tout le temps de descendre d’ici à ce que j’ai maitrisé cette technique. J’étais décidé à apprendre de mon passé et cesser de le fuir. C’était quelque chose de futile peut-être, mais j’y attachais de l’importance. Peut-être qu’en apprenant enfin ce que j’aurai du pouvoir montrer à mon père à son retour, je me détacherais un peu plus de ces chaines illusoires qui m’y liaient encore ? J’y donnais un certain crédit, ça valait le coup d’essayer. Puis, une nouvelle technique à apprendre pouvait toujours servir, au final. J’avais plusieurs bonnes raisons de dépenser mon temps de cette manière. Alors que j’écartais lentement les bras, la formation de la lance continuait en douceur. Je mettais un peu plus de temps qu’autrefois, mais le résultat était plus stable. Paradoxalement, maintenant que j’avais ce qu’il me fallait pour comprendre les fluctuations de chakra nécessaires, je comprenais toute la difficulté que je n’avais pas pu surmonter il y avait trois années de cela. J’étais trop rapide alors, si bien que je constituais ma lance comme un construit un pont sans lui laisser d’appuis. Le chakra de cette arme éthérée nécessitait de moi que je le dompte pour le faire entrer dans la forme, constamment, à chaque centimètre que je prenais en écartant mes bras sur le côté. L’entrainement de cet après-midi me serait sans doute très instructif…
Raimei Hokoru Juunin de Kumo
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Sujet: Re: Apprendre du passé. [Flashback / Entrainement] Jeu 11 Oct - 20:20
At least
- Raiton, Yari.
Je progressais petit à petit, même si j’éprouvais encore quelques difficultés. Cependant, la différence de niveau entre mon moi d’il y a trois ans et le moi actuel était notable. Mon contrôle de mon propre chakra s’était grandement amélioré, sans doute parce qu’en devenant Junin j’étais entré dans une sphère différente et que les missions et les environnements côtoyés m’avaient forcé à évoluer. Il y avait en effet eu un creux entre la vie que je menais en tant que Chunin, et cette bifurcation que j’avais empruntée une fois devenu Junin. En quelque sorte, je n’avais pas eu d’autre choix, pour être efficace et surtout pour survivre, que de devenir plus fort. Apprendre les ficelles du métier, pour ainsi dire, dans le monde ninja n’était pas une mince affaire. C’était non seulement dangereux, mais ça requérait une très bonne source de motivation ou du talent. L’un comme l’autre n’étaient pas donnés à tous. Certains cessaient leurs activités, à défaut de sombrer dans la médiocrité. Voilà ce qui m’avait également poussé à me remettre à cet entrainement, même si ça semblait être un coup de tête fortuit. Il me semblait impossible de me considérer comme étant un bon shinobi si je fuyais encore cet apprentissage. Je sombrerais alors dans la médiocrité, ce qui selon moi était synonyme d’être indigne des espoirs placés en moi par mon géniteur. Et être indigne de sa confiance était vraiment parmi les choses que je ne pouvais pas me permettre… pour moi, pour lui. Pour mon intégrité personnelle et parce que j’avais toujours grandi en espérant être valeureux à son regard.
J’écartais doucement les paumes de mes mains tout en respirant à mesure légère, gardant le silence alors que les lumières jaillissaient de mon épiderme et dansaient devant moi. Sauvages, farouches, elles tentaient d’aller à droite à gauche là où je voulais qu’elles se stabilisent. J’étais à l’exercice depuis un moment déjà, le soleil avait fait un bout de chemin dans le ciel alors que je m’efforçais à former une lance parfaite. Avec concentration et application, je faisais peu à peu revenir les éclats rebelles dans la ligne qui constituait la hampe de la lance. Mes bras continuaient de s’écarter de chaque côté de mon corps. L’arme prenait forme, après un moment déjà à faire des tentatives dont je parvenais à beaucoup mieux gérer les débordements. Autrefois, je me retrouvais les fesses contre le sol, déséquilibré dans le meilleur des cas, parce que mon propre chakra dégénérait dans mes mains et craquait à l’air libre et devant mon visage. Désormais, je pouvais résorber la lance quand je sentais qu’elle allait exploser. Ce qui m’avait beaucoup aidé dans l’apprentissage de mon jutsu, d’une façon irréfutable. Je sentais que je touchais au but… peu à peu. Le fait d’avoir commencé à l’apprendre il y a trois ans et d’y retourner aujourd’hui avec tout le bagage d’expérience que j’avais pu emmagasiner depuis me donnait l’impression que c’était une formalité. J’allais bientôt finir… la lance prenait forme dans ma main et je n’éprouvais plus de difficulté à la maintenir dans un état de stabilité très satisfaisant.
La lance quasiment formée dans mes mains, il ne me manquait plus qu’à faire fluctuer le chakra, provoquant une petite modification de l’une des extrémités qui sembla s’allonger pour vaguement prendre la forme d’un fer. Cela ne me prit que quelques secondes, le plus dur ayant été de former la lance et de garder cette même forme. Mais c’était fait. Elle était là, dans mes mains. La lance de foudre que mon père avait voulu m’enseigner depuis tout ce temps. L’électricité crépitait dans un léger bruit de fond alors que je manipulais l’objet, faisant des moulinets avec. Elle semblait totalement prête. D’un geste, je frappais dans le sol, laissant une marque en dégageant un peu de terre à mes pieds… avant de finalement balancer ma technique.
Elle s’éclata derrière l’arbre que mon père avait autrefois frappé, laissant une marque dans la roche du nivelage qui accompagnait l’énorme tronc. Nos deux marques étaient l’une à côté de l’autre. J’avais réussi à accomplir cette technique et j’en retirais une certaine fierté ainsi qu’un soulagement profond… celui d’avoir fait ce que j’avais à faire, finalement. Je pris encore un petit moment, répétant l’opération, m’assurant que ce n’était pas qu’un coup de chance fortuit et surtout… m’entrainant à viser au mieux avec cette technique. L’avantage était de pouvoir combattre à distance également, tout autant que de se servir de l’arme au corps à corps… ce qui me serait utile contre les adversaires spécialisés avec les armes blanches. Il était toujours difficile d’affronter un expert de Kenjutsu quand on avait que ses poings et pieds pour se défendre, pour la simple et bonne raison que la capacité de perforation / pénétration d’une lame était de loin supérieure à celle de la chair humaine. Parer un coup de poing était pour moi une banalité sans nom. Dévier un coup d’épée portée avec précision et force, c’était déjà une autre histoire… alors ce jutsu pourrait m’être d’une grande utilité dans ces cas-là. Je n’y voyais que du bon, j’en voyais même de plus en plus au fur et à mesure que je recréais la technique en vidant peu à peu mon chakra. Heureusement que j’étais en repos… sinon j’aurai pâti d’avoir quelque chose à faire à ce moment-là. En tout cas, j’avais réussi.
Je ne m’en sentais d’ailleurs que mieux. La fin de l’après-midi était arrivée et j’estimais ne pas avoir perdu mon temps. Le fait d’avoir commencé il y à trois ans avait accéléré l’apprentissage que je venais de terminer, c’était certain… puis, cette technique n’était pas d’un rang affolant même si bien utilisée, elle se révélerait être un avantage sérieux dans mes combats. En clair, j’allais achever cette journée sur une bonne note étant donné que cette deuxième partie du jour aurait été fructueuse en termes d’activité. Moi n’était venu que dans le but de penser un peu en flemmardant dans l’arbre… mon esprit m’avait joué un bon tour, au final. J’avais peaufiné le jutsu avant de finalement engager une marche lente vers la sortie du terrain, assez fatigué par les utilisations répétées mais néanmoins satisfait de ce que j’avais pu faire. C’est le sourire au lèvre que je quittais l’étendue rocheuse parsemée de verdures solitaires.
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