It's a long way to the top... (Suite) [Pv Shizuru & Asu]

Le temps va, vient, s'effrite. Libre comme le vent, splendide comme l'eau cristalline d'une cascade, il s'écoule et filtre au travers de nos âme, extirpant nos plus enfouis désirs, et allumant des feux de volonté. Il érode comme une bête enragée, inlassablement par des flots portés, les plus infimes parcelles de ce monde et les modèle selon son bon vouloir. Un talent dont il peut constamment se targuer, alors qu'il tisse des liens entre des connaissances, laissant jaillir une amitié sincère et dénuée de dessous, dans un monde où mensonge, culpabilité et trahison règnent. Et, lorsque le temps le permet, les chemins se croisent, s'enlacent pour ne former qu'une seule et même route, pour qu'adagio elles se séparent pour ne plus jamais se croiser de la même façon. Quelles étaient donc les retrouvailles que cet enfant du destin avait parsemé sur la route de notre blondin ? Quelques voix lui avaient sans doutes fait part de son futur, ne lâchant qu'un nom distinct. Alors seulement, le jeune homme se permit de sourire, alors qu'il claquait des doigts pour faire disparaître les ombres alentours, prenant à toute vitesse la direction de la porte de son propre village.

C'était l'air jovial et la mine fraîche qu'il arriva, à peine haletant, devant la paire de chuunins responsables des entrées et sorties de Konoha. Un travail bien ennuyant en ces jours perdus, mais nécessaire pour conserver la même rigueur que partout ailleurs. Et déjà l'agitation se faisait sentir, alors que les discrètes se voyaient révélées, et un semblant d'alerte donné. D'un geste du doigt, il intima au binôme de rester tranquille et de le laisser s'occuper de cette histoire, chose qu'ils exécutèrent sans piper mot. Fouillant dans sa poche, il en sortit une sucette qui glissa avec envie dans sa bouche, laissant les saveurs relevées de fruits envahir son palais. Toujours aussi bonnes... Alors seulement, il se lança à l'assaut de l'inconnu, qui n'était par ailleurs pas aussi impossible à prévoir que ce que l'on pouvait penser.

Telle une moquerie mordante, il commença à frapper dans ses mains à la vue de la jeune Hyuuga qu'il aurait put reconnaître entre mille, même ainsi accoutrée. Lentement, l'écho commença à se propager, faisant taire par la même occasion la petite patrouille qui était alors intervenue sur l'intrusion. Qu'espérait-elle franchement ? Faire comme si de rien n'était avec cette Kirijins sanguinolente, en pensant que personne n'allait avoir la curiosité titillante, rentrer dans l'enceinte du village et finalement se rendre compte que ni elle ni la kunoichi n'étaient en mesure de permettre à ses blessures de cicatriser. S'ensuivrait l'habituel scénario, ce même qu'il avait eu l'occasion de voir à ses dépends lors de la guerre ninja. Non, si elle avait voulu faire les choses dans la plus grande discrétion, elle aurait dû se contenter de le tenir au courant d'une façon ou d'une autre, pas uniquement en se présentant à lui, lui donnant la responsabilité d'une vie comme il en avait sauvées des dizaines. Un fin rire émana de lui, à la fois moqueur et rassuré, avant qu'il ne se s'autorise une légère courbette aux allures théâtrales. Il commença alors à s'approcher de la petite troupe ainsi acculée.

« Yare yare, j'aurais espéré te rencontrer dans des circonstances autrement moins professionnelle, Hinata. Comme toujours, tu apportes ton lot de surprise, une chose dont je ne me passerai jamais. Vous pouvez nous laisser messieurs, je prends la suite »

D'aucun ne contestèrent les dires du médecin, ce même qu'ils savaient suffisamment doué pour pouvoir s'occuper d'elles sans que plus de mal ne soit fait. Et à vrai dire, il était heureux de savoir que les quelques entorses au règlement qu'il avait pu faire de par sa jeunesse n'étaient pas tombées dans les oreilles d'autrui. Un soulagement sans doutes partagé lorsqu'il vit ses compatriotes quitter les lieux, retournant vaquer à leur patrouille monotone. Alors seulement il soupira, ce même soupir que la princesse Hyuuga avait sans doutes entendu un nombre incalculable de fois, et qui annonçait ses remontrances dissimulées. D'un geste vif et calculé, il déroula une paire de parchemins avant d'installer la jeune blessée avec délicatesse sur le sol. D'un rapide coup d'oeil, il l'examina, ne remarquant en premier lieu qu'une blessure béante au bras gauche, couplée à un poignet distordu -sans doutes cassé- et une multitudes de contusions çà et là sur son corps. Son appendice animal frappa l'un des sceaux apposés sur les parchemins, faisant sortir dans un petit bruit sourd ce qui semblait être un récipient à gâteaux, ce même qu'il tendit à Hinata.

« Tu devrais manger un peu, tu dois être épuisée. Je pense que tu auras également quelques explications à me donner plus tard. Tu as ma parole, je n'en parlerai pas tant qu'on n'aura pas eu cette conversation. »

Le blondin se mit alors à composer une série de mudra avant d'appliquer sa paume sur le front de la Kirijin, rendant alors cette dernière insensible à ce qu'il s'apprêtait à faire. Un luxe dont elle se serait sans doutes passer, mais qu'il lui offrait en « récompense » d'avoir eu la chance de tomber sur un médecin de sa trempe. Il effleura enfin une autre partie de parchemin, faisant sortir une poignée d'instruments métalliques qu'il manipula avec précision et rapidité pour achever son œuvre. Il avait ainsi réussi à retirer les fragments d'os de la blessure, avait réalisé un rapide clamp qu'il mit à profit pour soigner en profondeur la plaie et la recoudre du mieux qu'il put, toisant toujours un peu sa patiente d'un air condescendant. Un nouveau soupir, nettement moins agacé, vint emplir la zone alors qu'il se mettait à dissimuler les tâches de sang en les enroulant dans des bandes de tissu. Par la même occasion, il lui tendit sa propre cape, cette même avec laquelle il était arrivé. La kunoichi semblait suffisamment forte pour tenir debout et marcher à leurs côtés, d'autant plus qu'elle allait pouvoir tenir le coup avec l'anesthésie qu'il lui avait offerte. Se posait seulement le problème de Hinata, qui de toute évidence n'allait pas pouvoir faire comme si de rien n'était.

Asu, dans un éclair de lucidité, lui posa alors une nouvelle cape sur les épaules, avant de lui tourner le dos et de s'agenouiller. La queue de singe trahissant son hésitation, il avait penché la tête en avant pour que ses cheveux couvrent sa gêne temporaire. Il était sans doutes prêt à les amener à l'hôpital, peu importe le prix que cela allait pouvoir coûter.

« Profites en, ce n'est pas quelque chose que je m'amuserai à répéter. Allez, grimpe, on y va. »

Ne pas faire de manières, c'était la chose à dire. Mais connaissant Hinata, elle n'allait pas accepter directement, ce qui fut effectivement le cas. Mais à force d'insistance et de persuasion bien placée, elle se contenta de lâcher sa position pour prendre place sur le dos du blondin. Et mine de rien, elle pesait son poids la petit Hyuuga, à moins que ce ne soit la constitution d'Asu qui lui laisse paraître la chose ainsi. Toujours était-il qu'elle était faible et ne faisait aucuns efforts pour alléger la peine qu'elle infligeait à son sempaï. Ce dernier se garda par ailleurs de faire une remarque déplacée sur son poids ou la taille de sa poitrine, qu'il sentait compressée contre son dos. Une proximité dont il ne se plaignait pas, mais qui n'était pas pour autant le genre de contact qu'il aurait espéré avec son corps. Quelques à-coups plus tard, il fixait sa cavalière sur son dos, tâchant de lui offrir un minimum de confort en attendant qu'elle et sa compagne finissent dans une salle de l'hôpital de Konoha, où elles seraient prises en charge d'une façon autrement plus professionnelle.

Portant son regard de temps à autres lorsqu'il sentait la Kirijin fléchir, il guida les kunoichis jusqu'à ce que le centre de soin soit en vue. C'est alors qu'il sentit distinctement sa protégée d'un temps chercher à éviter les lieux. Il ne fallait pas être un grand génie comme le blondin l'était pour deviner qu'elle avait ses raisons pour agir ainsi. Sans doutes voyait-elle cet hôpital comme n'importe quel autre, avec ses chambres blafardes, ses hordes d'infirmières, et ce sentiment de solitude grandissant qui venait hanter chaque patients n'appartenant pas à ce monde. Sans personne pour leur rendre visite, sans personne pour prendre de leurs nouvelles. Le genre de vie que tous voulaient éviter, et ce même pour une semaine voire quelques jours. La peur perlait de l'esprit de la Kirijin, confirmant les hypothèses du jeune homme. Il se tourna alors vers elle, remarquant son teint livide et ses spasmes grandissants. Il soupira de plus belle, s'approchant de cette dernière pour lui glisser quelques mots.

« Je vais sans doutes regretter ça, mais tu peux venir chez moi. C'est beaucoup plus tranquille qu'une chambre d'hôpital, et je serai le seul à t'approcher. En échange, je veux que tu ne clamses pas sous mon toit »

Il appuya ses propos d'un petit sourire, déformé en partie par les efforts qu'il fournissait pour paraître toujours aussi droit. Sa galanterie le perdra sans doutes un jour, car à trop vouloir se plier au bon vouloir de la gente féminine, il finirait par emporter dans sa bêtise bien plus que sa simple personne. N'attendant pas la réponse de la jeune femme, il tourna les talons en commençant à se diriger vers le centre-ville, là où se trouvait son appartement. Hinata avait fini par s'assoupir sur son dos, emportée par cette accumulation de fatigue. Cette suite d'événements avait sans doutes brusquer leurs habitudes en grande partie, mais là étaient les inconvénients de la vie du ninja.

Il les fit passer par de petites ruelles dépeuplées, maints sentiers qui parurent comme des passages secrets tant on pouvait ignorer leur présence, mais ils jouissaient ainsi d'une discrétion à toute épreuve, évitant par la même occasion les éventuels shinobis qui patrouillaient çà et là. Le blondin finit par les emmener face à une porte qu'il présenta comme étant celle de son habitat. Ce dernier, à la fois simple et lumineux par les teintes claires qu'il arborait, disposait d'un mobilier limité, mais largement suffisant pour accueillir une paire d'invités surprises. Il invita la kunoichi à se coucher sur le sofa, tandis que lui portait Hinata jusque dans son lit. Il borda cette dernière sans plus d'attention, puis revint vers la Kirijin en se pinçant l'arête du nez. Ne dissimulant plus son agacement, la queue de singe traduisant cette même contrariété qui l'animait, le juunin de Konoha s'installa près de la jeune femme, la toisant d'un air mêlant curiosité et amusement. La question qui brûlait ses lèvres paraissait claire comme de l'eau de roche : en quoi cette personne poussait-elle Hinata à braver ainsi les lois ?

« Ton bras. Fais voir. »

Son hôte disposait de compétences certaines en herboristerie, et peut était peut être par la même occasion une kunoichi se versant corps et âme dans l'art des soins. Une ensei nin comme lui, n'est-ce pas ? Le genre de personne qu'il savait la plupart du temps comme étant dignes de confiance, ce qui renforçait les préjugés qu'il se faisait sur la personne couchée face à lui. Avec une douceur contradictoire avec son énervement, il reposa le membre de la jeune femme. L'espace d'un instant, il sentit même que dans sa faiblesse, elle cherchait à le jauger. Une chose inutile par la même occasion, on ne pouvait juger du contenu d'un livre par sa couverture. Par la même occasion, elle se présenta comme s'appelant Shuu'. Un diminutif qu'il se contenta de mémoriser. Au moins, il n'avait plus à chercher à mettre un nom sur cette bouille.

« Tu sais, Shuu', je connais Hinata depuis quelques temps maintenant. Elle est naïve, maladroite, facile à manipuler... »

Il tourna la tête vers sa chambre, espérant ne pas être entendu par la jeune femme. Apparemment, elle dormait à poings fermés, vu le peu de réaction qu'elle leur offrit. Il s'était maintenant fait plus doux, son agacement s'étant envolé pour laisser place à un léger amusement. Il commença alors à défaire les bandages qu'il avait auparavant appliqué, ces mêmes qui compressaient ses chairs pour limiter l'hémorragie et dissimuler ses blessures. Pas de doutes, son sofa et son lit allaient avoir besoin d'un bon coup d'eau pour enlever tout ce sang...

« Mais elle a aussi un cœur énorme, et ne s'acoquine pas avec n'importe qui. Elle est du genre à ne fréquenter que les bonnes personnes. »

Par là, il voulait faire comprendre à la jeune femme qu'il n'était pas si indigne de confiance, et que donc chercher à lui mentir n'était pas une solution si le binôme espérait trouver une solution à leur situation. Qui plus est, elles l'avaient emporté dans leurs vagabondages, il était normal de son point de vue qu'il soit mis au parfum. Le blondin espéra seulement que sa patiente partagerait ce point de vue. Sans quoi, ils se retrouveraient vite dans une impasse, chose qu'il ne leur souhaitait pas, pas même pour cette inconnue qu'il hébergeait le temps de son rétablissement. Les personnes qui en valaient la peine se faisaient rares en ce monde, il n'avait aucune envie de perdre deux d'entre elles dans des événements qui prendraient des proportions que même lui ne pourrait combattre. Et c'était dire à quel point il pensait à leur offrir cette liberté. Les explications, elles, prendront le temps qu'il faudra. Être pressé n'était pas dans ses préceptes, pas même lorsque la curiosité le taraudait toujours plus à propos de ces quelques ennuis.

Alors, comme pour couper court à la conversation, il se releva, l'air impassible mais nettement moins contrarié. Son petit saut d'humeur était passé, laissant place à quelqu'un d'autrement plus sympathique, chose qu'il ne tarda pas à montrer lorsqu'il plaça une couverture sur Shuu'. Voulant réprimer une quelconque remarque sur le fait qu'elle n'était pas du genre à se laisser ainsi faire par un inconnu, il posa son index sur sa bouche, un fin sourire dissimulé par sa main. Il s'éclipsa l'espace d'un instant pour revenir ensuite, arborant une tenue plus adaptée au sommeil. Rien de bien extravagant, rien de bien compliqué, juste de quoi se sentir à l'aise. Par ailleurs, il hésita à se coucher aux côtés de la jeune femme, un doute qu'il chassa rapidement en claquant des doigts. Comme animés par une force supérieure, une multitude de parchemins fusèrent dans sa direction, formant rapidement une rallonge au sofa sur laquelle le blondin s'installa. Ainsi, il ne brisait pas spécialement l'espace intime de la kunoichi, et pourrait jouir d'un sommeil aussi réparateur que celui qu'il escomptait pour ses invitées.

« Je reste chez moi après tout. J'espère juste que tu ne bouges pas dans ton sommeil, le mien est plutôt léger. Et entre nous, je ne fais jamais rien le premier soir. »

La dernière remarque s'était voulue légèrement moqueuse, suffisamment pour qu'elle ne le prenne pas au sérieux.

Il l'écouta sans mots dire, un fin sourire charmeur tracé sur son visage à l'entente de ces quelques principes auxquels elle répugnait déroger. Ainsi, elles n'avaient pas perdu leur temps dans cette aventure, mais ne l'avaient sans doutes pas assez pris pour laisser à la princesse le plaisir d'explorer des voies autrement plus... jouissives. Il étouffa alors un petit rire serein, posant sa tête sur sa main tandis qu'il toisait la jeune femme.

« Quel dommage. Cependant, je doute que tu aurais tenu le rythme, vu ton état... »

Il pointa le corps de la jeune femme d'un doigt nonchalant, avant d'effectuer un léger mouvement circulaire avec ce dernier. Il était clair qu'elle avait beau avoir des formes relativement attirantes et un joli minois, tout ce sang et cet air fatigué pouvait rebuter le plus renfrogné des pervers. A cette pensée, il eut un nouveau sourire, toujours aussi peu dissimulé. Cependant, à voir les mouvements las et à la limite du supplice de Shuu', il mit un rapide terme à ses propres moqueries, si gentilles furent-elles. Sans piper mot, il écouta les quelques mots qu'elle lui lâchait, bien qu'il se doutait bien évidemment qu'elle se permettait d'enjoliver le tout en omettant les détails les plus importants. Se sentait-elle donc à ce point si peu en confiance ? Le blondin leva alors sa main avant de la poser sur celle de sa partenaire d'un soir. Lentement, elle pouvait sentir la douleur disparaître, alors qu'il inhibait cette dernière. Se reposer était désormais une priorité pour elle, aussi allait-elle sans doutes devoir mettre de côté ses désirs les plus primitifs.

« Tu te doutes que je ne me contenterai pas de ça, pas de si peu. Je vous sauve du pétrin, j'espérais un peu plus d'honnêteté, mais ce n'est pas si grave. Dors, Shuu'. Demain est un autre jour... »

Finalement, parler avec elle avait réveillé quelques questions existentielles qui l'avait auparavant rongé. Qui pouvait-on considérer comme une bonne personne dans un monde pareil ? N'était-ce là que l'expression la plus secrète de nos vœux les plus chers ? Il soupira alors, chassant par la même occasion les questions qui s'accumulaient dans son esprit. Trouver une réponse à si il était une bonne personne ou non n'était pas encore dans son intérêt. Il gardera ça pour plus tard, pour quand il se sentira d'attaque pour s'occuper des détails sans importance. Pour l'instant, seul comptaient les états de ses patientes. Sans bruit, il se leva de son lit de parchemins, désireux de rendre une visite en catimini à la princesse Hyuuga. Cette dernière semblait dormir tout son saoul, chose dont il se réjouit.

Pour lui, la nuit commençait désormais. Une nuit passée à surveiller la Kirijin, de peur que son état ne vienne empirer au cours de la nuit -on n'était jamais trop prudents- ou encore qu'elle revienne sur sa décision de ne pas suivre ses principes. Lui, de toute évidence, ne s'opposerait pas à ce genre de pratiques, bien que son statut de médecin le mette en garde. Il revint peu de temps après sur son tapis de parchemins qui épousèrent sa position pour lui garantir un excellent sommeil. Les yeux fermés, la tête remplie de questions qui le taraudaient encore et toujours, les bras de Morphée n'en furent que plus accueillants...

Morphée savait être doux avec quiconque consentait à finir dans ses bras. Sans doutes était-ce le seul contact intime avec un homme que le blondin se permettrait d'avoir. En position fœtale, il rêvassait, maugréant contre le divin qui martyrisait son esprit par des assauts incessants du fruit du démon. Il perdait beaucoup de sa superbe dans ce genre de situations, mais cela était principalement mis sur le compte de son esprit surdéveloppé. Un don qui apportait son lot de désagréments, mais qui ne faisait pas perdre au jeune homme de sa crédibilité. Non, il ne paraissait que plus tendre, nettement moins méchant et d'autant plus humain. Chose qu'Asu ne contredirait sans doutes jamais, bien que sa vantardise et son orgueil faisaient de lui un être étrange à côtoyer.

Lentement, il se sentit tomber dans les abysses de la réalité lorsqu'un goût âpre vint lui agresser les narines. Son esprit embrumé s'extirpa alors de sa torpeur alors qu'il reconnaissait les fragrances du café. D'un bond, le blondin se redressa, l'air pataud et clairement mal réveillé. Lentement, il tourna la tête vers la fenêtre, remarquant qu'il devait être beaucoup trop tôt pour lui, avant d'enfin se rendre compte que sa patiente était à l'origine de cette odeur infâme de café. Sans cérémonies, il se mit à bailler avant de quitter son pseudo-lit, se dirigeant vers la cuisine. Par la même occasion, le Konohajin se permit de grogner légèrement face à la Kirijin. Rien de bien agressif, mais qui traduisait clairement son mécontentement ; il aurait en effet tellement apprécié un repos un peu plus long... Ignorant les dires de son hôte, il revint se poser à table avec une paire de gâteaux en bouche et une tasse de thé fumant en main.

« Tu abuses un peu, le soleil vient à peine de se lever... Et appelle moi Asu, pas blondin... »

Il regarda alors d'un air dédaigneux le café, faisant un petit signe de main pour signaler qu'il n'en prendrait pas. Cette amertume envahissait alors son palais alors même qu'il ne faisait que se remémorer le goût que ce liquide -dont il n'appréciait que très rarement les propriétés- avait. Son appendice animal se hérissa légèrement, bousculé dans ses habitudes, un fin frisson lui parcourant l'échine. C'est par le silence que le blondin répondait à son interlocutrice, les prémices d'une discussion autrement plus intéressante. Doucement, Asu guidait le fil des événements, désireux d'en savoir plus sur le genre de situation qu'il couvrait. Cependant, il était inutile de préciser que pour lui cela relevait davantage du détail, sa position lui permettait en effet d'être au courant de rendre des comptes à une partie impressionnante du monde shinobi.

« J'aimerais savoir d'où vient ce sang. »

Concis et clair. Il avait tourné la phrase pour ne pas brusquer son interlocutrice, de peur qu'elle ne se rétracte dans le silence et les mystères l'entourant. Car, bien qu'il disposait d'une poignée d'informations sur le pourquoi du comment, ces dernières étaient beaucoup trop vagues pour qu'il ne se permette de laisser les détails les plus insignifiants s'échapper. Cela relevait en effet peut être de la sécurité du village, ne serait-ce que pour l'intrusion des deux kunoichis. Si Hinata était capable de pénétrer l'enceinte du village ainsi, il était plus que probable que des personnes autrement plus redoutables puissent faire de même. Heureusement pour eux, ils disposaient d'un impressionnant Kekkai, ce même qui permettait aux autorités de savoir quand une personne n'appartenant pas au village pénétrait les environs.

Cependant, voyait-elle les choses du même œil que le blondin, ou cette soudaine question allait-elle la mettre à l'aise, ce qu'il redoutait le plus?

Réglé un problème familial, n'est-ce pas ? Comme si il allait se contenter d'une réponse aussi jolie. Il lui fallait quelque chose d'autrement plus concret sur lequel s'appuyer, pas uniquement les enjolivements d'une Kirijin qui avait peur de laisser la vérité, aussi amère soi-elle, sortir de sa bouche comme un venin qu'elle cracherait à la tête du blondin. Lui, impassible tandis qu'il soufflait sur son thé pour le refroidir, était préparé à entendre les pires insanités qu'il avait put rencontrer dans tout son parcours sur ce sentier sinueux de la vie. Sans mots dire, attendant que son interlocutrice fasse preuve d'un caractère un peu plus loquace, il essuya le café sur sa main avec douceur. Il savait qu'il l'avait sans doutes déjà beaucoup brusquer en parlant aussi directement, sans prendre de gants. Mais le temps pressait désormais, à moins que ce ne soit juste lui qui s'impatientait d'entendre sa version de l'histoire. Chose qui ne tarda pas à venir.

Pendant son discours, il buvait lentement son thé, se permettant de quitter la table pour effectuer ses quelques mouvements pour davantage se réveiller. Ainsi donc, l'affaire familiale relevait de la mort de sa génitrice, un « détail » qui lui rappela vaguement les prémices de sa propre vie, en plus de son enfance quelque peu perturbée. Sur ce point, il ne pouvait que comprendre la détresse de la jeune femme, adoptant un air nettement plus concerné qu'auparavant. L'amertume rongeait cependant son esprit, comme un poison qui se dissipait au fur et à mesure de ses chasses mentales successives. Un dérangement qui passa cependant inaperçu aux yeux de la kunoichi, fort heureusement pour elle d'ailleurs. Asu n'était pas du genre à apprécier qu'on s'immisce comme il le faisait dans sa vie, ainsi protégé par des murailles de volonté qui se dressaient entre le monde alentours et sa personne.

Le silence commença à s'installer, coupé par moments par les gesticulations du jeune homme. Ces dernières terminées, il se réinstalla à la table pour laisser reposer sa tête sur ses mains, regardant d'un air condescendant Shuu. Finalement, c'était peut être là la raison pour laquelle Hinata l'avait emmenée ici : pour qu'il la prenne sous son aile, en sachant pertinemment qu'elle saurait l'attendrir d'une quelconque façon. Un objectif bien pieux en soi, certainement trop bien interprété par le blondin à la queue de singe pour qu'il s'avère réalité. Par où pouvait-il alors commencer ? Les mots sortirent comme il les pensait. Au diable le tact et la galanterie, il y avait des choses parfois plus importantes que le code d'honneur et la conduite qu'on adoptait.

« Pour ta gouverne, j'ai envoyé mon père en prison, où il est mort pendu. Ma mère, quant à elle, est morte à ma naissance. Les choses aussi ont mal tournées. »

Il soupira lentement, comme si il regrettait déjà devoir faire part de ses propres expériences pour se sauver de cette situation. Tout génie qu'il était, que pouvait-il faire contre sa propre histoire ? Le passé devait être analysé pour en tirer l'essentiel, pas pour qu'on le ressasse inlassablement en espérant qu'un jour il change. C'était du moins une vérité acquise pour lui, le fruit d'un raisonnement poussé alors même qu'il pensait pouvoir pleurer la perte de ces êtres qui auparavant lui étaient chers. Lui, cependant, ne s'était pas laissé dépassé par les événements comme le faisait Shuu'.

« Si les choses ont mal tourné, ce n'est pas de ta faute. Tu as put régler tes affaires -pas de la façon dont tu l'espérais certes-, je n'aurai jamais l'occasion de le faire. Vois les choses d'un autre œil à défaut de ne t'en prendre qu'à toi. C'est tout ce que j'ai à répondre, vu que tu penses m'en avoir trop dit. »

Il faussa un sourire à la jeune femme, trahissant par la même occasion la tristesse qui perlait dans son cœur. Une lame si profondément enfouie que la voir ressortir ici et maintenant avait tendance à le laisser croire qu'il perdait pieds, se laissant emporter par un flot d'émotions soudain, à la fois destructeur et salvateur. Ce même flux qu'il pensait avoir endigué derrière sa muraille de volonté, et dont quiconque pouvait crocheter la serrure une fois les mécanismes de cette dernière compris. Pour autant qu'il s'en souvenait, c'était la première fois qu'il sentait les larmes perler à ses yeux. Le silence retomba alors, clairsemé des tentatives du jeune homme de combattre sa solitude dévoilée.

« Détrompe toi. De nous trois, seule Hinata peut prétendre être une brebis. Et je ne fais pas tout ça gratuitement. »

Il la regarda d'un air satisfait alors qu'il se permettait de s'immiscer dans son esprit, profitant de la faiblesse de son interlocutrice. Cette situation commençait à l'agacer, et il n'était sans doutes pas le seul. La psychologie restait un instrument à manipuler avec précautions, mais la fatigue et l'exaspération rongeaient peu à peu son mental. Heureusement pour lui, la situation pouvait dissimuler ses quelques divagations dans les profondeurs meurtries de l'âme de la jeune femme. Elle cependant, ne semblait pas apprécier la tournure que prenaient les événements. Une occasion comme une autre de lui rappeler la situation, chose qu'elle avait oublié dès lors qu'elle avait brisé sa tasse. De toute façon, il n'aimait pas ce jeu-ci ; il préférait les verres de terre cuite, nettement moins fragiles et bien inscrits dans cette tradition qu'il se plaisait à respecter. Il se leva alors de sa chaise, visiblement irrité par le manque de relativité de la jeune femme.

« Et à ton avis, je suis qui ? Tu attends quoi de moi ? Que je te dise que j'ai toujours voulu te cracher à la gueule, que tu me dégoûtais et que ta présence ici me répugnait ? Réveille toi un peu, le monde est pas tout blanc ou tout noir »

Son air trahissait son agacement, qui peu à peu se changeait en une colère grandissante et injustifiée. C'était sans doutes là les limites de son esprit, ces mêmes limites que ses capacités lui imposaient. Et à force de réagir comme ça, il se rendait davantage compte de cette limite. Qu'est-ce qui lui prenait finalement, si ce n'était la fatigue, comme une lame pernicieuse qui désirait le mettre à nu alors qu'il se tenait face à une bête sauvage blessée ? D'autant plus qu'il n'était pas à la place du chasseur. Une nuance qui semblait avoir du mal à passer chez la jeune femme. Peut être qu'un peu plus d'honnêteté resterait la meilleure solution. Une fois de plus, son incapacité à gérer les conflits humains perlait. Cependant, son humeur se voyait changée lorsqu'elle parla de la laisser partir. Pour toute réponse, il se contenta de retourner se coucher sur son canapé, ne cachant pas un soupir d'exaspération. Pensait-elle seulement être capable de sortir dans cet état ? Il en doutait fort, pas après avoir vu les blessures qu'elle arborait.

« Tu n'es pas enfermée ici, fais ce que tu veux. »

Il se mordit alors les lèvres, prêt à rajouter quelques mots en plus. Hinata lui avait apporté assez d'ennuis, il n'était pas dans son intérêt de la laisser partir. Pas sur ce genre de discussion, sans quoi elle allait sans doutes mal voir la présence du blondin aux côtés de « cette gamine ». Son image auprès de la gente féminine restait un plaisir, une priorité qu'il se devait de conserver.

« Si tu passes le pas de cette porte, je ne pourrai plus assurer ta sécurité. Et crois moi, « ils » sont nettement moins cléments que moi. »

Il marqua un silence, se relevant avant de planter un regard de saphir en elle. Si elle voulait faire preuve d'entêtement, elle devait cependant garder en tête qu'Asu avait agi contre le bien de son propre village, et ce pour quoi ? Une alliance, une amitié, une mission ? N'importe quoi qui pourrait être parfaitement réfuté si quelqu'un venait à vouloir lui chercher des crosses. Comme toujours, lui allait s'en sortir, ce n'était pas pour autant qu'il parierai la même pour Shuu'. Comme lui conseillant vivement de rester ici, même si la situation lui déplaisait on ne peut plus, il rajouta quelques mots avant de reposer lentement sa tête sur l'oreiller. L'odeur de la jeune femme restait imprégnée, un plaisir qui flatta son odorat. Et si elle venait à le faire, la suivrait-elle finalement ?

« Si tu passes le pas de cette porte, tu seras seule au monde... »

Les minutes passèrent alors, lentes et lourdes de conséquence. Combien de temps allait-elle mettre avant de se faire repérer, pour que finalement elle se rende compte de l'erreur elle avait fait en quittant le domicile du blondin ? Et ce dernier qui se voyait désormais assailli par la mémoire des derniers instants passés avec elle, le tout couplé à la réaction de la princesse Hyuuga lorsque cette dernière sortirait des bras de Morphée... Que pouvait-elle dire de plus ? Que tout cela était de sa faute, qu'il n'avait pas cherché à la retenir alors qu'il savait pertinemment qu'elle n'était pas en état de sortir ? Et dans son envie de bien faire les choses, le blondin s'exécuterait, à la fois pour passer outre la colère de sa protégée que pour alléger sa conscience de médecin. Cherchant à chasser cet agacement soudain, le jeune homme se tourna dans dans son canapé, tombant nez à nez avec les tâches de sang laissées par Shuu' sur le tissu. Parce qu'en plus elle comptait partir sans nettoyer sa nuit ?

Il bondit alors en dehors de sa couche, se dirigeant vers sa table pour griffonner un mot à l'attention de Hinata. Car après tout, cette dernière n'allait sans doutes pas se réveiller tout de suite, aussi la laisser ainsi en plan allait s'avérer être une source supplémentaire de problèmes. Il ne la connaissait que trop bien pour se douter qu'elle voudrait partir avec lui, qu'elle voudrait parler à sa Kirijin favorite. Et lui dans tout ça, avait-on pensé ne serait-ce qu'un peu à la situation qu'il s'imposait en acceptant de l'aider au lieu de jouer les indifférents ? Il se sentait rattrapé par sa conscience, à la fois rassuré d'être toujours aussi humain et agacé de se faire manipuler d'une telle façon. C'était sensé être lui qui tirait les ficelles, pas la première femme venue !

Il déboucha sur la rue, questionnant çà et là les passants pour voir si jamais ils n'avaient pas aperçu une jeune femme apparemment blessée. Une rapide description et quelques déceptions plus tard, une bande de gamins s'affolaient dans une avenue adjacente, criant à un retardataire qu'il devait se dépêcher si il ne voulait pas rater la femme qui mourrait. Le rapprochement n'eut pas lieu d'être qu'Asu bondissait déjà sur le mur pour ainsi passer outre une bonne partie de la foule. L'instant d'après, il atterrissait aux côtés de la jeune femme, soulagé de la retrouver. Une consolation qui disparut bien vite lorsqu'il intima aux badauds de lui laisser de la place pour qu'il puisse s'occuper d'elle. Ils s'exécutèrent sans mot dire, alors que le blondin à la queue de singe déroulait un parchemin avant d'en sortir ce qui semblait être un tuyaux comme on en croisait dans les hôpitaux. Un petit dispositif était accroché à ce dernier, sans doutes pour faciliter le transfert de sang. Heureusement pour elle, il était donneur universel, une perle rare qui allait lui sauver la vie.

« Quand je t'ai dit de pas clamser sous mon toit, c'était pas pour dire que tu devais le faire à 50m de chez moi »

Il planta alors les aiguilles dans le creux de son bras et dans le poignet de sa protégée, lançant par la même occasion le don. Lentement, le liquide de vie s'écoula d'un corps à l'autre, un processus apparemment remarqué par les passants comme salvateur. Du coin de l'oeil, le blondin aperçut un trinôme de juunins prêts à intervenir, mais qui semblaient vouloir le laisser faire avant de faire irruption dans cette scène touchante. De toute évidence, il savait pourquoi ces derniers étaient là, aussi il se contenta de faire mine qu'il ne les avait pas remarqué, se concentrant sur son opération. Sans plus tarder, il retira le cataplasme que Shuu' s'était appliqué auparavant, mettant en évidence sa plaie infectée. D'un rapide coup de scalpels à chakra, il détruisit les chairs viciés avant d'appliquer les mêmes soins qu'il lui avait prodigués la veille. Il prit davantage de temps cette fois-ci, de peur que l'infection reprenne de plus belle. C'était là un des défauts d'une opération à l'air libre, le genre qu'il avait l'habitude de faire cependant.

Ces soins terminés, les énergumènes qu'il avait repérés auparavant se permirent de le bousculer pour empoigner la jeune femme. Ignorant les recommandations du blondin, le reste s'enchaîna sans plus tarder : Asu voulut imposer son point de vue, critiquant le fait que sa patiente n'était pas assez en forme pour être ainsi malmenée. Le blondin se heurta rapidement à un excès de zèle, avant de frapper l'un d'entre eux qui l'avait exaspéré par ses mimiques moqueuses. Se reprenant alors, harassé par la fatigue et l'énervement, il se mit en garde pour recevoir les prochains assauts. Il eut cependant la chance de rapidement s'enfoncer dans les ténèbres, une consolation qu'il prenait avec le plus grand soulagement. Cela lui offrirait le temps qu'il lui fallait pour sortir de cet état absent et nettement dérangeant. Hinata comme Shuu', il lui fallait oublier l'espace d'un instant ces deux protagonistes. C'est donc le sourire aux lèvres qu'il s'enfonça dans les abîmes de son inconscience...