The answer is blowing in the wind. [solo.- Partie 1]

BE or not to BE… ?

Depuis quelques temps, la belle était perdue.
Ses excès divers et variés ne lui conféraient plus le « frisson » qu’elle aimait tant… Sorties au bar, virées nocturnes et autres sauteries n’avaient plus le même parfum et lui laissait un arrière-gout amère. Elle avait bien tenté de remplir ses journées en concoctant des potions, ou des remèdes, mais cela avait finis par l’ennuyer… Passer tout son temps à se partager entre les missions et l’hôpital avait vraisemblablement eu raison de ses velléités de découvertes.

Vautrée sur son canapé, la kunoïchi regardait une énième émission de télévision stupide… Une bouteille de saké solidement vissée dans la main, elle espérait que le temps passe plus vite. C’était assez dégradant de se retrouver ainsi au final… Elle qui avait tant idéalisé l’oisiveté se rendait compte que c’était assez dur à vivre. Embourbée comme elle l’était dans l’inactivité, il devenait difficile de s’en sortir. Les idées noires tourbillonnaient dans son esprit, stagnaient sans qu’elle puisse les chasser et cela commençait à devenir handicapant… La demoiselle recassait, encore et encore, les images de son voyage : Sa « mère », le sang, les cris. Tout se présentait sous forme de flashs qui entrecoupaient ses beuveries… Des scènes très courtes, saccadées, qui la secouait comme une poupée de chiffon. Sa lame qui s’abattait, jugement final, sur le corps recroquevillé de Yukiko, et le regard terrorisé d’Hinata… Ces images ne la quittaient jamais.
Une nouvelle nuit passée à boire, puis à vomir ses tripes sans personne à ses côtés. C’était désormais son lot quotidien…

Ce matin-là était, en apparence, comme les autres : Migraineux, nauséeux et sans intérêt. Un rapide passage dans sa douche et retour à la case canapé… Ses préoccupations se résumaient à : qui y’a-t-il aujourd’hui à la télé ? Et elles n’étaient pas prêtes de changer.

®Clock®

Le bruit discret de sa « boite aux lettres » (une simple fente dans la porte) qui s’ouvrait et se fermait aussi sec. Les quelques rares papiers qu’elle recevait étaient des factures, ou à défaut des relevés de solde qui n’avaient rien de réjouissant… L’adage « pas de nouvelle, bonne nouvelle » était à prendre au pied de la lettre (haha). Cependant, mû par une motivation somme toute relative, la jeune femme se leva et attrapa l’enveloppe avant de retourner s’asseoir… Tiens dont, l’administration la faisait mentir ; il s’agissait d’un relevé de ses statistiques. Rapports de missions, évaluations en situation de combat ; tout était réunis en deux ou trois feuilles. Ses yeux parcoururent rapidement les quelques premiers paragraphes puis, ils se posèrent sur quelque chose de plus intéressant… L’appréciation globale :

« Ninjas moyen, sans grandes capacités en particulier offensives. Peut s’avérer être un poids pour ses camarades aux vues de son caractère solitaire et de son incapacité à attaquer, ne serait-ce que pour se défendre. »

Le choc était total. Certes, elle ne s’attendait pas à des éloges, mais tout de même… « Poids » ? C’était un peu fort.
Bougonne, la jeune femme laissa tomber le rapport au sol et s’enfonça dans ses coussins. Sa moue dépitée valait toutes les explications du monde ; elle était vexée. C’était la première fois qu’on la jugeait, jusqu’ici Shuu’ s’était toujours arrangée pour que personne ne se penche sur son cas… Mais maintenant qu’elle était devenue chunnin, on la surveillait d’un poil plus prêt. Cela ne lui plaisait guère de savoir un œil toujours braqué en sa direction ; surtout quand cet œil avait tant de choses à lui reprocher. Curieusement, cette frustration la picotait de l’intérieur, la réchauffait presque… Mais c’était une chaleur acre et âpre qui n’appelait qu’à être éteinte. Comme un défis qui s’était invité à sa porte et qui ne demandait qu’à être relevé… Pour « eux » ? Non. « Ils » ne l’intéressaient pas le moins du monde ; ce commentaire –d’ailleurs très abrupte- n’était qu’un prétexte. Il lui fallait quelque chose d’actif, d’ultra-prenant, quelque chose qui chasserait ses démons à grands coups de courbatures et de douleurs.

Derechef, elle rattrapa les feuilles jetées un peu plus tôt et les lissa. C’était vraisemblablement sa « puissance d’attaque » qui posait le plus problèmes… Quant à son rapport aux autres, il attendrait sa prochaine crise existentielle. La belle ne connaissait qu’un seul moyen de remédier à la situation : l’entrainement. C’était un mot qu’elle n’avait pas prononcé depuis longtemps et il avait une saveur particulière… Avant de devenir celle qu’elle était alors, Shuu’ avait été un shinobis assidu ; peut-être même plus que les autres. Irou jutsu et Kenjutsu étaient deux arts que la Yukimitsu avaient développé au prix de nombreuses heures de pratiques… Et, en y réfléchissant, cette époque d’astreinte total au rythme de vie ninjas avait été très satisfaisante. Aucune pensée, bonne ou mauvaise, ne venait polluer son esprit et seul comptait le dépassement… Peut-être que c’était ce qu’il lui fallait après tout.

Meet me at the half-way.

Mais qu’était-elle en train faire ?
C’était comme se jeter dans la gueule du loup… Marcher, de son propre chef, jusqu’à l’administration du village. Mais aujourd’hui était différent d’hier ; la kunoïchi se sentait animée d’un feu qui la dévorait de l’intérieur et il lui fallait agir. S’entraîner seule aurait été inutile, cela faisait trop longtemps qu’elle ne s’y était pas essayé… Il lui fallait un senseï ! et pour le trouver, il lui fallait se résoudre à se présenter à ses supérieurs et mendier l’enseignement.

Le hall d’entrée du bâtiment donnait le ton à lui tout seul : Grand, vide, sans décoration et pourvu d’un unique bureau… Y était collée une vieille femme au chignon grisonnant, l’air acariâtre… Assez peu rassurée par l’ambiance, Shizuru marqua une pause. Etait-ce réellement raisonnable ? Cette harpie risquait de sceller son destin d’un unique coup de tampon. Après un ultime soupir, la belle se résolut à avancer vers la potence ; c’était un peu tard pour reculer… Et après tout, ce n’était pas si terrible ! Enfin, elle l’espérait. Désormais « adulte », la jeune femme n’était plus sensée craindre l’autorité ; du moins en théorie. Mais, en pratique, la réalité était toute autre… Se retrouver ainsi, face à un supérieur « hiérarchique », lui coupait tous ses moyens. Ainsi, elle avait soit tendance à s’empourprer comme une pivoine soit à sur-réagir violement. Mais cette fois-ci devait-être différente ; pourquoi ? Elle l’ignorait.

« Hum. Pardonnez-moi, mais j’aimerais effectuer les démarches pour que l’on m’attribue un senseï. » Sa voix un peu sèche ne parvenait pas à couvrir ses trémolos… Son interlocutrice releva ses yeux de chouette du dossier qu’elle lisait avant de lui lancer un regard dédaigneux « Shizuru Yukimitsu n’est-ce pas ? » -« Eeuh… Oui ? » Un peu interloquée, la jeune femme recula d’un pas « Nous avons déjà un senseï pour vous, depuis deux ans… Vous n’êtes jamais venu le réclamer ni ne vous êtes présentée à un entraînement. »

Evidemment.
Après avoir « remonté les bretelles » de la jeune kunoïchi, la « secrétaire » finit par lui confier un papelard très officiel sur lequel se trouvait le nom de son futur instructeur. Le rendez-vous fut fixé le lendemain, très tôt dans la matinée… Trop tôt. Après une nouvelle nuit passée à se saouler, la demoiselle fut incapable de se lever aux aurores et, comme l’on pouvait s’y attendre, manqua largement à son devoir. Courroucé par tant de légèreté de la part d’un shinobis, le junnin refusa de renouveler l’expérience et confia Shizuru aux bons soins de l’un de ses collègues… Ce dernier se vit plus ou moins gratifié du même sort et, comme le premier, il abandonna très vite. S’en suivirent plusieurs malheureux qui, les uns après les autres, subirent les foudres de son désœuvrement… Les responsables des entraînements finirent par se donner le mot et, très vite, plus personne n’accepta de chapoter la kirijin.
Peut-être qu’au final elle n’était plus capable de rien… Tout juste à s’imbiber dans les pires rades de la ville, et c’est ce qu’elle allait faire. Le sabre vaguement jeté sur le dos, Shuu’ se laissa donc tomber au comptoir du premier bar qui croisa sa route… Il était quasi désert, comme tout établissement pitoyable qui se respecte ; deux ou trois filles tortillaient de ci, de là en petites tenues et l’ambiance générale trahissait le niveau. Trois clients, en tout et pour tout, étaient disséminés dans la salle.

Après un long soupir non dissimulé, la belle commanda une bouteille de saké et entama sa soirée « comme il se doit ». Non loin d’elle se trouvait un homme encapuchonné, silencieux, tellement discret que la jeune fille n’avait même pas relevé sa présence… Cependant, il la zyeutait. Shizuru avait parfaitement l’habitude d’attirer le regard des hommes, et ce depuis son plus jeune âge ; c’était un passage obligatoire lorsqu’on avait son… Pédigrée :

« Un beau sabre que tu as là. » Sa voix rauque la surprit quelque peu, elle ne s’attendait pas à ce qu’il engage la conversation « Il tranche bien, oui. » Le caractère de sa phrase n’appelait aucune réponse… Et pourtant « Je suis ninjas de profession, je ne peux pas m’empêcher d’apprécier une belle lame. » C’était une entrée en matière assez étrange pour une partie de drague… La kirijin tourna alors la tête vers son interlocuteur ; il s’agissait d’un être encapuchonné, vraisemblablement un homme « Drôle d’entrée en matière pour mettre une femme dans son lit, ça a déjà marché ? » Un éclat de rire, haut et clair, fendit le silence « Ah, ma petite… T’es un peu jeune à mon goût, même si tes attributs sont convainquant. »

C’est ainsi que s’engagea la conversation. Le pilier de bar s’avéra être un shinobis qui, effectivement, ne s’intéressait qu’à son arme… Doucement, l’après-midi se transforma en soirée, puis, en nuit. Les cadavres s’amoncelaient autour d’eux et les « nouveaux amis » avaient fini par se plaire. L’ambiance s’était détendue, la discussion avait tourné plus… « Philosophique ». Une bonne partie de masturbation intellectuelle avec un Homme digne de ce nom, cela faisait des années que ça ne lui était pas arrivé ; voir jamais. But, convictions, certitudes et autant de questions existentielles furent abordés jusqu’à très tard et, finalement, le tenancier les jeta dehors. Imbibés jusqu’aux os, ce furent deux silhouettes branlantes qui titubèrent dans les rues de Kini no Kuni, éclairés par le feu des astres. Désormais liés par l’indéfectible pouvoir du saké, ils étaient amis pour toujours mais surtout pour l’instant.
Ivres morts, ils finirent par s’écrouler sur un banc. Shizuru avait toujours bien tenu l’alcool, mais à ce niveau-là, il n’était plus question de tenue… Sa tunique largement ouverte et ses joues rosies trahissait son taux d’alcoolémie et sa désinhibition :

« Ah mon vieux, si tu savais… » dit-elle en lui frappant l’épaule « Ah ça, ma belle, j’suis bourrée moi ! Pas télépathe. » Immédiatement, la jeune femme s’écroula de rire. Secouée par de puissants spasmes, la kunoïchi ne put retenir quelques larmes « Pffff ! Tu sais bien. J’ai besoin de devenir plus… Puissante ! Pour enfin pouvoir me débrouiller, être indépendante ! » Le dénommé Ryusaky porta alors un regard affectueux sur sa jeune comparse « T’es mignonne. Je me suis entrainé pendant des années pour devenir «fort»… Et tu ne l’es jamais assez. »

Un peu plus tôt dans la soirée, le quadragénaire lui avait conté ses exploits de jeunesse et ils étaient, effectivement, assez impressionnants. Moult aventures avaient ponctué sa vie et ils les avaient toutes vécues passionnément… Ses capacités semblaient lui donner les moyens de tout faire, même l’impossible :

« Apprend moi ! Apprend moi à devenir… Comme toi. »

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