Prélude.
Dans l'ombre d'un sakura, allongés dans l'herbe grasse, deux amants s'étreignaient. Ils étaient comme seuls au monde, loin des regards et des jugements. Ici, seul leur amour comptait. Sur le dos, la femme contemplait le visage bienveillant de celui qu'elle aimait. Ses longs cheveux blancs comme la neige, lâches, flottaient au grès des brises d'été. De son côté, il admirait les yeux de jade de sa moitié.
« Pourquoi souris tu ? » lui demanda-t-elle.
« Parce que je suis heureux... »
Sur ces mots, il se rapprocha de son visage et déposa un chaud baiser sur ses lèvres. C'est ainsi que vint au monde Azura. Loin de la civilisation et des mœurs.
On pourrait se demander pourquoi cet acte de procréation se fit-il si loin d'une couche chaude. Un acte fantaisiste peut être mais la vérité était tout autre. La vie est souvent mal faite. Deux âmes perdus ont parfois la chance de se retrouver mais généralement, la générosité du destin s'arrête à cela. La vie peut vous donner l'occasion d'entrevoir le bonheur mais trop souvent, on le guette comme des voleurs à travers la serrure d'une porte close. Les parents d'Azura étaient de ceux qui avaient refusé de ne se contenter d'un regard. La vie et les traditions avaient fait en sorte qu'ils ne pourraient jamais vivre en paix tant qu'ils resteraient proche de leurs foyers et de leurs familles respectifs. Lui était fils d'un rebut de la société, de ceux qui dit on, déshonore le pays par leur mode de vie : un yakuza. Elle était de ceux qui naissent dans des draps de soie et qui ne connaissent du monde que les jardins familiaux et les murs de leur domaine. Néanmoins, le destin fit qué par un heureux hasard ils se rencontrèrent et il ne fallut que très peu de temps pour que chacun comprenne qu'il ne pourrait vivre sans l'autre. Commença alors une vaine histoire d'amour entre ces deux êtres. Ils pensaient que cela se ferait dans le plus grand secret que jamais personne ne découvrirait leur secret mais ils étaient bien dupes de croire que le petit jeu était méconnu de leurs familles. Et dans l'ombre de leur amour, occulté par leurs candeurs, le danger grandissait.
La graine fut planté, sans qu'aucun des amants n'en ait conscience. Leur petit jeu continua pendant encore bien des semaines et ils pensaient que jamais ce ballet amoureux ne tournerait au drame. Le problème était que leur amour n'était pas seul à grandir. Au creux du ventre de la femme, la vie s'implantait et germait. Et plus qu'elle ne le pensait, les gens se posèrent des questions puis lui posèrent des questions. Un jour, la vérité éclata mais il était trop tard. Les pères, noble et bandit se confrontèrent tandis que les mères pleuraient. L'un réclamait vengeance l'autre le menaçait de bien pire. Que restait-il ? Sous les cendres de leur amour brûlé par la colère des familles, les amoureux avaient tout perdu. L'un fut envoyé à la guerre, seul moyen de lui éviter une mort publique et l'autre fut reniée, banni dans les montagnes jusqu'aux portes d'un monastère oublié. Jamais les amoureux ne se revirent.
Jeunesse.
Comme si la séparation des deux amoureux n'avait pas suffit, comme si la vie avait réclamé que ce soit Azura qui paie la dette de ses parents, qui avaient pris plus que la vie n'avait à offrir, en plus de grandir sans père et sans famille, il fallut qu'il grandisse sans mère. A sa naissance, sa mère mourut d'une infection. Il ne lui restait alors que pour seule famille putative une tripotée de bonzes. On pourrait penser que des débuts aussi catastrophiques dans ce monde ne pouvaient que se suivre de récits encore plus sombres mais le destin, semblait-il, avait décidé que la jeunesse de l'enfant serait moins tumultueuse. Grandir au milieu de moines n'est pas tache facile bien que la vie dans un monastère ne soit pas aussi brutale et cruelle que celle dans un monde déchiré par les guerres. Azura eut une éducation stricte mais juste. On l'apprit bien des valeurs dont notamment le respect de la vie quelque soit sa forme. Cela en faisait-il autant de lui un pacifiste ? Sûrement pas notamment lorsque le dit monastère avait la réputation de cacher bien des secrets et des trésors. Les visites étaient fréquentes pour un monastère aussi reculé et rares étaient celles qui avaient un but autre que de vouloir piller un trésor dont l'existence ne tenait qu'à des mythes et rumeurs. Afin de lutter contre les nombreuses attaques et tentatives de cambriolage, les moines étaient de solides guerriers. Les armes savaient être maniées mais aucune arme monastique n'étaient aussi redoutable que les poings de ces bonzes. C'est dans ce cadre qu'Azura reçut son éducation guerrière qui semblait-il, était inné chez cet enfant de nobles et de bandits.
Pour ce qui est de son éducation intellectuel Azura reçut l'éducation d'un parfait petit moine. Les textes anciens, les textes religieux, les textes politiques et j'en passe. On pourrait alors croire que l'on a à faire à l'homme valant un milliard, semblant doué dans tous les domaines mais la réalité était bien loin de cela. Aussi talentueux soit un forgeron, il n'arrivera jamais à faire d'un métal affaibli une lame sans égal. Azura était proie à un mal que même les moines ne pouvaient comprendre, un mal qui l'accompagnait depuis sa naissance. Son cœur était pure mais chaque jour une petite parcelle de son innocence était grignoté par des ténèbres inconnus. L'enfant souriant devant un adolescent morne et refermé sur lui même. Lorsque ce dernier devint un homme, on crut que le mal avait disparu car des années de travail acharné des moines sur cet enfant semblant être maudit fit de lui un adulte presque normal du moins en apparence. On ne savait pas très bien si Azura était maudit ou simplement fou mais ses symptômes étaient inexplicables. Pour cet raison, il ne pouvait au delà des murs du monastère.