Mission de rang C: ninjas médecins sans frontières. [solo]

Les yeux vides, accoudée au comptoir des admissions, Shizuru semblait absente. Les grandes cernes qui soulignaient son regard indiquaient que sa garde s’était prolongée plus que de raison… C’était une journée comme les autres à l’hôpital ; les malades défilaient dans les couloirs aseptisés et les médecins manquaient cruellement. C’était un désagréable exercice que celui de la clinique ; il était lent, répétitif et souvent peu gratifiant… Mais il était nécessaire ! Aux yeux de l’administration, qui jugeait peu crédible que ses ninjas-médecins ne s’impliquent pas dans les soins de la population et aux yeux de son porte-monnaie, qui ne se remplissaient qu’une fois son solde obtenu. Et oui, après quelques calcules, la jeune femme était arrivée à un bilan mitigé : Pour vivre libre 50 pourcents du temps, il fallait travailler comme une damnée les 50 autres pourcents. C’était une pilule dure à avaler, mais dont-elle préférait encore s’ accommoder…
Et oui, ça a un prix la vie de bohème. A chaque nuit sa bouteille, sa sortie au bar et à chaque fin de mois son frigidaire désespérément remplit de rien… Du haut de ses 21 ans, Shizuru n’était pas vraiment ce qu’on pouvait appeler un modèle de stabilité.

Encore vêtue de son uniforme, la kunoïchi se traina jusqu’à son vestiaire pour y récupérer son sac avant de errer jusqu’à chez elle. La fatigue rongeait tous ses muscles et seul le mot « dormir » raisonnait dans sa tête… Alors que d’un geste las, la demoiselle refermait son casier, une main masculine vint se coller contre le rabat métallique. Un peu surprise, elle hoqueta avant de reculer ; par reflexe, elle sortit même un kunai qui se dressa entre eux-deux. Ce ne fut qu’après avoir pu voir le propriétaire de la dite main en entier que la jeune fille se rassura ; c’était un ninjas du village, comme le montrait son bandeau et il tenait un dossier qui n’annonçait rien de bon.

« Shizuru Yukimitsu, vous êtes chargée d’une mission à remplir sous les plus brefs délais. C’est une mission confidentielle, tous les renseignements dont vous aurez besoin se trouvent dans cette enveloppe. »

Tout cela sonnait comme un texte maintes fois répétés et qui n’appelait aucune réponse… Aussi se saisit-elle de son dû en soupirant et s’en retourna enfin. Rien de pire que de terminer une garde pour enchaîner avec une mission ; sauf peut-être terminer deux gardes et enchaîner avec une mission. Dans le grand boulevard qu’elle empruntait tous les jours pour aller de son appartement à la clinique, ses pensées se perdirent… Y’avait-il assez d’aspects positifs dans ce mode de vie pour passer outre les négatifs ? Se sentait-elle bien, asservie à la cause d’un seul chef ?
En poussant la porte de sa petite maison, la pression retomba un peu. Même si la simple possibilité de faire sa nuit était désormais compromise, il allait bien falloir trouver en elle la force de se lancer… Un café ? Non, c’était trop léger, pour tenir les 12 prochaines heures, il lui fallait quelque chose de plus… costaud. C’était dans ces cas-là qu’elle se félicitait d’avoir tant potassé ses manuels d’herboristerie ; sa pharmacologie était des plus complètes, en cela le climat de Kiri avait son avantage, et grâce à elle tout devenait possible. Un peu lasse, la jeune femme saisit son mortier et quelques fioles remplies de baies et d’herbes. L’un de ces contenants renfermait une mixture à base de caféine concentrée, l’autre une pâte visqueuse majoritairement composée de guarana et d’un peu de coca écrasée… Une fois tout mélangé, elle l’introduisit dans de grosses gélules et en goba une. C’était un petit mélange artisanal, qui avait déjà fait ses preuves. Après un court passage dans la salle de bain et sous la douche ; la kunoïchi s’habilla jeta quelques affaires dans un sac et se saisit de son nécessaire de secours… Puis, après un long soupir de résiliation, elle ouvrit le dossier.

Sur quelques pages, dont certaines plus que censurées, on distinguait le profil ninjas d’un homme d’à peu près 80 ans, vraisemblablement ancien adepte du irou-jutsu. La courte biographie mise à sa disposition indiquait qu’il avait servi sa patrie avec bravoure durant des décennies, puis qu’il avait disparu il y a sept ans… Il n’avait jamais pris de disciple et son répertoire de techniques allait disparaître avec lui si jamais personne ne parvenait à le ramener à la raison. Une mission de récupération ; traverser la moitié du pays pour récupérer un vieillard sénile… Génial. La prime était à la hauteur du défi, très moyenne. Mais il lui fallait au moins ça pour remplir les réserves…
Une fois le dossier négligemment jeté sur la table la plus proche et la porte verrouillée ; la jeune femme quitta le village. C’était une très longue et très ennuyeuse aventure qui s’annonçait ; une de celles qu’on préférerait oublier…

TO BE CONTINUED [au prochain épisode]

Lien vers la seconde partie.

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